Charges sociales sur dividendes : faut-il appliquer l’abattement de 40% ?

Les travailleurs non-salariés affiliés au régime social des indépendants (RSI devenu sécurité sociale des indépendants – SSI) ont, dans certains cas, à s’acquitter de cotisations sociales calculées sur le montant des dividendes qu’ils ont perçus. Par précaution, les conseils et cotisants déclaraient le dividende brut, c’est-à-dire avant abattement fiscal de 40%. Pourtant, un jugement du tribunal judiciaire a condamné l’URSSAF, dans un sens contraire. Il estime que le calcul des cotisations doit s’effectuer sur le montant net des dividendes, après application de l’abattement de 40% (le cas échéant). L’URSSAF n’ayant pas fait appel, le jugement est devenu irrévocable et la décision définitive, ouvrant la voie à une multitude de réclamations (demande de remboursement)…

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Dividendes soumis aux cotisations sociales : rappel du cadre légal

Les dividendes servis à certains dirigeants de sociétés supportent les cotisations sociales en vigueur pour les travailleurs non-salariés (TNS). En effet, la législation les assimilent, depuis 2013, à des revenus du travail et non à des revenus du patrimoine.

Sont notamment concernés par cette disposition les dirigeants, ayant également la qualité d’associé et exerçant une activité dans une structure soumise à l’impôt sur les sociétés :

  • Les gérants d’entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée (EURL),
  • Les gérants majoritaires de société à responsabilité limitée (SARL),
  • Et les entrepreneurs individuels à responsabilité limitée (EIRL).

Cela vise également les associés de société en nom collectif (SNC) soumise à l’impôt sur les sociétés (IS).

La fraction des dividendes soumise aux cotisations sociales correspond au montant dépassant 10 % du capital social, des primes d’émission et des sommes versées en compte courant d’associé. Pour les EIRL, on retient 10 % du montant du patrimoine affecté ou 10 % du bénéfice net (si ce montant est plus important).

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Dividendes à déclarer pour le calcul des charges : avant ou après abattement ?

Historiquement, les dividendes ont toujours été déclarés pour leur montant brut, c’est-à-dire avant abattement de 40%. Les professionnels – experts comptables notamment – n’ont jamais pris de risques à ce sujet. Le Code de la Sécurité Sociale (CSS) prévoyait, dans sa version en vigueur jusqu’au 1er septembre 2018 que les dividendes à prendre en compte constituaient les revenus « retenus pour le calcul de l’impôt sur le revenu », avec renvoi à un article du Code Général des Impôts (CGI).

Or, il s’avère que le CGI appliquait un abattement égal à 40% du montant brut perçu. Ce qui pouvait amener à penser qu’en matière sociale, il fallait déclarer les dividendes, non pas pour leur montant brut, mais pour leur montant net, abattement déduit. En effet, les textes sociaux (Article L. 131-6 du CSS) ne renvoyaient pas explicitement à l’alinéa évoquant l’abattement, mais ils ne l’excluaient pas non plus expressément.

Et c’est ce qu’a confirmé un jugement à l’encontre de l’URSSAF du 6 novembre 2019 (Tribunal judiciaire de Melun). Dans ce dernier, l’URSSAF a été condamnée à rembourser les cotisations sociales appelées lors de la régularisation 2017 sur des dividendes bruts perçus en 2016 ; quand bien même des circulaires du régime social des indépendants (RSI devenue sécurité sociale des indépendants SSI) donnaient des instructions dans le sens contraire contraires.

L’URSSAF n’ayant pas interjeté appel dans les délais prescrits par la Loi, ce jugement est, depuis, devenu irrévocable.

Conséquences de la prise en compte de l’abattement de 40%

Réclamation des cotisations excédentaires versées à l’URSSAF en 2017, 2018 et 2019

Il résulte des informations données ci-dessus que les TNS ayant distribué des dividendes peuvent demander, sous certaines conditions, un remboursement. En effet, en déclarant les dividendes pour leur montant brut, ils ont payé plus de cotisations sociales qu’ils ne le devaient. Ils peuvent, dans ce cas, envoyer une demande de remboursement. Cette dernière doit être adressée au Directeur de l’URSSAF en lettre recommandée avec avis de réception (LRAR).

Attention, les actions en réclamation de cotisations sociales se prescrivent au bout de 3 années. Les demandes de remboursement de cotisations payées en 2017 doivent donc partir avant le 31 décembre 2020. En cas de refus ou d’absence de réponse dans les deux mois, le TNS doit saisir la commission de recours amiable. Si la commission refuse de donner suite à la demande ou ne répond pas (dans un délai de deux mois), le TNS doit saisie le pôle social du tribunal judiciaire.

Précisons enfin que les règles s’avèrent plus complexes pour 2018 et 2019, avec l’entrée du prélèvement forfaitaire unique (Flat tax). En effet, les TNS ayant opté pour le PFU en 2018 et 2019 ne peuvent bénéficier de l’abattement de 40% sur leurs dividendes, en ce qui concerne l’impôt sur le revenu (IRPP). Par conséquent, il ne peut dans ce cas s’appliquer en matière sociale. En conclusion, seuls les TNS ayant opté pour le barème progressif de l’impôt sur le revenu en 2018 et en 2019 peuvent formuler des réclamations.

Réflexion à mener à compter de la déclaration des revenus 2020 (2021)

La déclaration des revenus de l’années 2020, produite en 2021, est unique. Elle concernera non seulement l’administration fiscale mais également les organismes sociaux (URSSAF notamment). La « déclaration sociale des indépendants » (DSI) n’existe plus à compter du 1er janvier 2021.

Au moment de déclarer les revenus 2020 – et donc les dividendes – il faudra mener une certaine réflexion. Vaut-il mieux rester au PFU ? Ou, au contraire, opter pour le barème progressif ? Certes, l’option pour le barème progressif paraît moins avantageuse car elle pourrait générer un supplément d’impôt pour les plus aisés. Cela dit, elle permettrait, dans le même temps, d’échapper aux cotisations sociales TNS pour 40% du montant du dividende brut… Le calcul en vaut peut-être la peine…

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Thibaut Clermont

Co-fondateur et rédacteur du site Le Coin des Entrepreneurs
Média online de référence sur la création, la reprise et la gestion d'entreprise
Expert en création d’entreprise



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