COVID 19 : L’assurance perte d’exploitation

Certains restaurants, bars et autres commerces, contraints de fermer du fait de l’épidémie de Covid 19, sont assurés au titre de leurs pertes d’exploitation. Ces garanties, lorsqu’elles existent, ne sont toutefois pas toujours applicables aux fermetures administratives, ni aux épidémies.

Le contrat d’assurance, et plus particulièrement les clauses définissant les événements assurés et les clauses d’exclusion de garantie, doivent ainsi être étudiés pour déterminer si une indemnisation est possible.

Il ressort cependant de certaines décisions de justice récentes que, même en présence de clauses d’exclusion pouvant sembler applicables à l’épidémie de Covid 19, les assureurs peuvent être condamnés à indemniser les assurés de leurs pertes d’exploitation. Une clause d’exclusion de garantie doit en effet répondre à certaines conditions pour pouvoir s’appliquer.

Ce dossier d’actualité a été rédigé par Arthus Noël, avocat au sein du cabinet PONROY NOEL ASSOCIÉS.

COVID 19 assurance perte d'exploitation

Conditions pour obtenir une indemnisation

Pour que l’assuré puisse être indemnisé de ses pertes d’exploitation causées par l’épidémie de Covid 19, il est nécessaire :

  • que le contrat d’assurance prévoie une indemnisation des pertes d’exploitation ;
  • qu’au moins un des événements couverts soit applicable à la situation : par exemple, la fermeture administrative de l’établissement ;
  • que l’indemnisation ne soit pas limitée aux dommages matériels ;
  • qu’aucune clause d’exclusion ne permette à l’assureur de refuser une indemnisation, comme une clause excluant les épidémies et pandémies.

Il est par ailleurs important, concernant les clauses d’exclusion de garantie, de vérifier si celles-ci sont valides.

En effet, selon les articles L.112-4 et L.113-1 du code des assurances, une clause d’exclusion de garantie n’est valide qu’en présence de trois conditions cumulatives, l’exclusion devant être :

  • formelle ;
  • limitée ;
  • rédigée en caractère très apparents.

La jurisprudence en a déduit que la clause d’exclusion devait être suffisamment claire et détaillée, et qu’elle ne devait pas vider l’assurance de sa substance.

Peuvent notamment être cités les arrêts suivants :

Cour de cassation, 26 novembre 2003, n°01-16126 : « Mais attendu qu’ayant relevé que la clause d’exclusion contenue au paragraphe 3-2 du contrat d’assurance visait l’ensemble des documents techniques unifiés et des normes, textes et réglementations très vastes ne permettant pas à l’assuré de déterminer avec précision l’étendue de l’exclusion, (…) , la cour d’appel, (…) a pu en déduire, (…) que la clause d’exclusion, imprécise, n’était ni formelle, ni limitée, et était donc nulle par application de l’article L. 113-1 du Code des assurances »

Cour de cassation, 16 juillet 2020, n°19-15676 : « Vu l’article L. 113-1 du code des assurances : Il résulte de ce texte qu’une clause d’exclusion de garantie ne peut être formelle et limitée dès lors qu’elle doit être interprétée. (…) la cour d’appel, qui a procédé à l’interprétation d’une clause d’exclusion ambigüe, ce dont il résultait qu’elle n’était ni formelle ni limitée, a violé le texte susvisé. »

Une clause d’exclusion ne respectant pas ces conditions sera déclarée nulle.

Jugements du Tribunal de commerce de Paris du mois de septembre 2020

Le Tribunal de commerce de Paris a rendu plusieurs Jugements, au mois de septembre 2020, dans des affaires opposant des restaurateurs à l’assureur AXA. Les restaurateurs demandaient la condamnation d’AXA à les indemniser de leurs pertes d’exploitation, causées par la fermeture administrative de leurs établissements, en raison de l’épidémie de Covid 19.

Les contrats d’assurance contenaient la clause d’exclusion suivante :

« lorsque, à la date de la décision de fermeture, au moins un autre établissement, quelles que soient sa nature et son activité, fait l’objet, sur le même territoire départemental que de celui de l’établissement assuré, d’une mesure de fermeture administrative, pour une cause identique ».

L’assureur se prévalait notamment de cette clause pour refuser l’indemnisation demandée. Le Tribunal a considéré que cette exclusion, concernant entres autres la garantie prévue pour les épidémies, vidait la garantie de sa substance.

Selon le Tribunal, le contrat prévoyant l’indemnisation des pertes d’exploitation à la suite d’une fermeture administrative causée par une épidémie, et dans la mesure où il est très improbable qu’une fermeture administrative causée par une épidémie puisse ne concerner qu’un seul établissement dans le département, la clause d’exclusion a pour effet de rendre cette garantie inopérante et la vide donc de sa substance.

Le Tribunal a donc refusé d’appliquer cette clause d’exclusion et l’assureur a été condamné à indemniser les restaurateurs.

Parmi les décisions de justice rendues récemment dans ce contexte, certaines ont ainsi statué en faveur des assurés, d’autres en faveur des assureurs.

Les contrats d’assurances ne prévoient en effet pas tous les mêmes exclusions de garantie. Par ailleurs, il peut arriver que différents Tribunaux retiennent des analyses distinctes, pour des clauses identiques.

Certains de ces Jugements devraient donner lieu à des arrêts d’appel et, éventuellement, à des arrêts de la Cour de cassation, dans le futur, ce qui devrait permettre d’unifier la jurisprudence.

Comment procéder pour demander une indemnisation ?

L’assuré doit, dans un premier temps, déclarer le sinistre à son assureur et lui indiquer le montant de la perte d’exploitation, par courrier recommandé avec accusé de réception.

En cas de refus ou d’absence de réponse de l’assureur, et si cette position n’apparaît pas justifiée, celui-ci peut être mis en demeure, puis une action en justice peut-être engagée.

Il est recommandé de demander conseil à un avocat, pour étudier le contrat d’assurance et évaluer les chances de succès d’une action en justice.

Arthus Noël

Arthus Noel a travaillé plusieurs années au sein du département de droit immobilier d’un cabinet d’avocats parisien, avant de fonder le cabinet Ponroy Noel Associés. Les principaux domaines d’intervention du cabinet Ponroy Noel Associés sont le droit immobilier, et notamment le droit des baux commerciaux, le droit des contrats, le contentieux commercial, ainsi que le droit public.



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